8M22 – Le succès de la radicalité à Marseille

La première chose que l’on sent, c’est l’odeur des bombes de peintures. En arrivant sous l’Ombrière, les effluves du Vieux-Port de Marseille disparaissent, remplacées par les émanations chimiques du matériel posé sur une bâche tendue sous l’abri miroitant. Il y a du monde en cet après-midi ensoleillé. Et pour cause, en cette journée du 8 mars et grâce à l’organisation du collectif Marseille 8 mars, cette section du Vieux-Port se transforme en Zone d’Occupation Féministe.

Alors qu’une quinzaine de personnes participent à une initiation à l’autodéfense, d’autres se pressent autour d’une dizaine de stands montés pour l’occasion. Documentation sur la transidentité, la précarité menstruelle ou la situation des femmes au Kurdistan, fanzine ou chamboule-tout, la diversité est au rendez-vous. Et la créativité aussi. Pendant qu’une chorale répète des chants féministes, plus loin, l’atelier pancarte attire nombre de militant∙es inspiré∙es pour élaborer des slogans inventifs. L’accent de cet après-midi est mis sur le partage et l’échange. Un 8 mars qui prendrait la forme de rencontres féministes. Des rencontres entre des militant∙es qui ne se connaissent pas forcément, entre des activistes d’horizons différents, de cultures différentes. Et c’est bien ça le point fort de cette mobilisation.

Diversité et radicalité au cœur de la marche

Il est 16h45 quand les premier∙es représentant·es des collectifs et associations se saisissent du micro pour procéder à quelques discours. Ce qui frappe d’abord, lorsqu’on est habitué à des mobilisations plus institutionnelles, c’est la pluralité évoquée des luttes au sein du féminisme. Les luttes contre le racisme, le colonialisme, les violences policières ou la précarité ont toute leur place au côté de celles contre les violences machistes, sexistes et sexuelles. Et c’est ce mélange, ce croisement des luttes qui crée au sein de la mobilisation une radicalité affichée, revendiquée et portée, malgré la présence de groupes traditionnellement plus institutionnels, par une majorité de militant∙es.

17h45. Alors que le soleil commence à décliner, les quelques 1500 personnes s’élancent dans les rues marseillaises aux cris de « révolte féministe ». Les slogans raisonnent partout où le cortège passe. « Zineb, Zineb, on t’oublie pas, on pardonne pas. » « Solidarité avec les immigré∙es. » « À bas le patriarcat, les flics, l’Etat. » Sans oublier le désormais habituel « violences sexistes, riposte féministe. » Du cortège de tête où la non-mixité aurait du être la règle – mais c’était sans compter sur les journalistes pourtant sommés de la respecter – un mélange de colère et de rage se dégage. Une force qui exalte les militant∙es et rallie parfois quelques passant∙es au cortège. Plus d’une heure : c’est le temps qu’il lui faut pour rejoindre La Plaine où l’arrivée était prévue, la « faute » aux écarts engagés pour se détourner du tracé officiel déclaré en préfecture.

Et quand la marche se termine pour laisser place à la fête, un slogan crié à plusieurs reprises reste en tête. Un slogan dont il est bon de se rappeler, quand les oppressions deviennent si lourdes qu’il semble impossible de s’en échapper, quand le déchaînement de violence semble éteindre tout espoir de riposte. « Transformons notre peur en rage, notre rage en force et notre force en lutte. »







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