Ce vendredi 18 février, peu après midi, une vingtaine de membres d’Extinction Rébellion (XR) ont mené une action de blocage sur le chantier du Lien, au nord de Montpellier.
La Liaison Intercommunale d’Évitement Nord, c’est un projet de jonction routière reliant l’A750 et l’A9, sur 35 km. Un serpent de mer vieux de 40 ans, dont il manque aujourd’hui 8 km de tronçon à réaliser, entre l’A750 à Bel-Air et la RD986 au nord de Saint-Gély-du-Fesc. Un projet écocide aussi (destruction de plus de 40 000 arbres et de 115 espèces protégées, construction d’une ZAC d’au moins 70 hectares…), dénoncé depuis des années par de nombreux collectifs militants (SOS Oulala, Greenpeace, ANV-Cop21, XR…). Cet été, une ZAD a même vu le jour, jusqu’à son expulsion manu militari en novembre dernier sur ordre du nouveau préfet Hugues Moutouh.
Cet automne, le Conseil d’État a rendu un avis remettant en question la Déclaration d’Utilité Publique du Lien, et a saisi la Mission Régionale d’Autorité environnementale (MRAe). Cette dernière a publié un rapport critiquant sévèrement l’étude d’impact initiale du Lien, pointant du doigt une série d’imprécisions, un manque de chiffres et de méthodologie sur la supposée future fluidité du trafic routier. Le Conseil d’État avait aussi relevé un manque d’indépendance, puisque la précédente autorisation environnementale émise en 2014 avait été diligentée et signée par la préfecture de l’Hérault.
Ces avis/rapport n’étant pas suspensifs, le chantier poursuit son cours. Le Département passe en force. Ce qui était jusque-là garrigue et colline est désormais une pente dévastée et plate, bientôt prête à être goudronnée. Parmi les principaux instruments de ce massacre : un concasseur. C’est la cible du jour.
En arrivant sur le chantier comme des randonneurs, les militant·es de XR n’ont pas à forcer. Pendant que deux d’entre elleux content fleurette à l’agent de sécurité présent, les autres n’ont qu’à enjamber une petite barrière de barbelés pour s’emparer du concasseur. L’action se passe bien plus facilement que prévu, les ouvriers ayant fini leur journée à midi. Les activistes recouvrent l’engin de faux sang (eau, maïzena et colorant alimentaire – « ça part à l’eau »), pendant que deux militantes s’armlockent sur la machine et que d’autres déploient drapeaux et banderoles. Un binôme de France 3 filme la scène.
À défaut d’ouvriers, le chef de chantier arrive, excédé, comme l’agent de sécurité, furieux d’avoir été berné. Ils appellent les gendarmes, qui arrivent assez rapidement. Les militant·es, une quinzaine désormais, sont encerclé·es dans le “parking du concasseur”. Certains jouent les médiateurs. XR étant une organisation non violente, aucune dégradation autre que visuelle n’a été effectuée sur l’engin. Le but était avant tout d’attirer l’attention sur la consultation menée dans le cadre de la nouvelle enquête publique, en cours jusqu’au 2 mars. Les négociations se déroulent cordialement entre des militants soucieux de ne pas finir au poste et des gendarmes inquiets de les voir revenir aussitôt. Ce ne sera pas le cas. La caméra de France 3 est partie, le coup de com’ est réussi, l’action terminée. Alors que le bruit d’une disqueuse menace gentiment les militantes armlockées, les gendarmes contrôlent l’identité des personnes présentes, et laissent tout le monde repartir, à l’exception d’un militant “médiateur”, embarqué pour une courte audition libre.
Les militant·es étaient partagé·es entre la joie d’avoir réussi leur action de sensibilisation, qu’elle se soit bien passée (et sous un temps magnifique), et la rage de voir ce qu’est devenu le site. Et de savoir que le chantier reprendrait dès lundi.
Photographies : Clara Maillé
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