Difficile de déterminer ce qui aura le plus marqué cette troisième mobilisation importante contre le Pass Sanitaire à Montpellier. Son étendue d’abord, est à souligner. Près de 10 000 personnes au plus fort de la manifestation. Alors que le rendez-vous était donné à 14 heures sur la Comédie, on n’y comptait « que » plusieurs centaines de personnes, ce qui laissait à penser que la mobilisation serait peut-être moins importante que les semaines précédentes. Force est de constater que ce ne fut pas le cas dès le départ de la manifestation. Avec un flot ininterrompu de manifestant∙es, de la gare jusqu’à l’Arc de Triomphe, le cortège est massif, bien que peu dense par endroit. « Liberté ! », scandent-ielles, comme depuis le début du mouvement. Cette semaine encore, on retrouve tous les profils. Des familles avec des enfants, des militant∙es, des étudiant∙es ou encore des membres du personnel de santé. Avec quelques nouveautés.
Alors qu’on ne les avait que peu vus ces dernières semaines, des groupes de militant∙es antifascistes étaient aussi de la partie. Et pour cause, le groupuscule identitaire de La Ligue du Midi avait aussi annoncé sa participation à la journée. Une soixantaine de ses membres ou du groupe Jeunesse Saint-Roch étaient donc mêlés au cortège. Cependant, aucun affrontement n’a lieu, si ce n’est de lointaines et discrètes provocations, aux yeux de la foule en tout cas.
L’ambiance, elle, n’est plus vraiment à l’euphorie des débuts, à voir la mobilisation prendre rapidement. À Montpellier, les conflits et tension semblent prendre un peu plus de place. De façon pas toujours explicite, comme lorsque quelques manifestant∙es font face aux forces de l’ordre rangées devant la préfecture et que le reste du cortège, comme pour se désolidariser, se met à chanter « la police a des enfants ». Aux « la police avec nous » répondent quelques « ACAB ». Un peu plus tard, alors qu’une banderole antifasciste est déroulée en tête de cortège, celui-ci se fait demi-tour pour ne pas à avoir à marcher derrière au prétexte que la mobilisation est « apolitique, apartisane, qu’il n’y a pas de classes sociales, pas de partis politiques, ni de religion ». Notons tout de même qu’en parallèle, les drapeaux français et nationalistes sont nombreux, on tend le mégaphone à des complotistes qui affirment que « le vaccin donne le sida et la malaria », et peu de reproches sont faits aux pancartes qui assurent que « Dieu est de notre côté ».
Quoi qu’il en soit, ce dernier incident est révélateur de la tendance vers laquelle le mouvement semble localement s’engager. Si cela reste pour le moment minoritaire, les paroles des groupes complotistes liés à l’extrême-droite sont de plus en plus visibles et celles d’extrême gauche cachées. Au-delà de ça, le climat semble se tendre. Plusieurs fois, des manifestant∙es en viennent aux mains et se bousculent. Autre incident qui a beaucoup fait parler les médias nationaux, l’agression d’un pharmacien qui effectuait des tests antigéniques par une poignée de manifestant∙es.
Les médias et les journalistes aussi, sont pris pour cible. « Les médias sont le virus », peut-on lire sur nombre de pancartes. Le message est clair. Et revendiqué. « Médias collabo, médias collabo », hurle la foule à plusieurs reprises. Et quand un journaliste de Midi Libre sort sur les balcons de la rédaction située sur la place de la Comédie pour prendre des photos, la réaction est immédiate. Les majeurs se lèvent instantanément, le gratifiant de « collabo » ou « d’assassin ».
Difficile de déterminer quelle tournure vont prendre les prochaines mobilisations, la vapeur pourrait aussi bien s’inverser puisque ces faits ne sont ceux que d’une minorité. Il est aussi possible de questionner la possibilité du mouvement de rester sans leader, quand depuis 3 semaines ce sont souvent les mêmes personnes qui prennent la parole et en tête de cortège. Combien de temps pourra-t-il rester « apolitique », si tant est qu’il l’ait a un moment été, au vu des revendications ? Les prochaines semaines seront sans doute déterminantes.
Photographies : Photocratie
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