À Montpellier, blocage lycéen et manif étudiante

Il est 7h45. En ce jeudi 3 février, une partie de la jeunesse montpelliéraine est déjà bien réveillée. Sur le campus de l’Université Paul-Valéry, une vingtaine d’étudiant∙es bloquent le bâtiment de la présidence. Au même moment, à quelques kilomètres de là, ce sont les étudiant∙es du lycée Jules-Guesde qui s’activent, déplaçant poubelles et autres barrières pour fermer les accès de leur établissement.

Cette journée marque un appel national de mobilisation étudiante. Hausse de frais d’inscriptions, dégradation des conditions d’études, précarité étudiante massive… C’est une exaspération qui ne disparaît pas, à l’égard des politiques menées par le gouvernement ces 5 dernières années, qui a poussé les étudiant∙es de plus de 53 universités en France, selon l’Unef, à organiser diverses mobilisations. À Paul-Valéry, une centaine d’étudiant∙es ont répondu à l’appel du Scum pour une marche censée se dérouler du campus de la fac de lettres jusqu’au rectorat.

« Gratuité des universités »

Les propos avaient fait réagir. « On ne pourra pas rester durablement dans un système où l’enseignement supérieur n’a aucun prix pour la quasi-totalité des étudiants, où un tiers des étudiants sont considérés comme boursiers et où pourtant nous avons tant de précarité étudiante. » Macron, en s’adressant ainsi aux président∙es d’université, serait-il en train de remettre en cause la gratuité de l’Université ? C’est en tout cas ce qui motive d’autant plus les manifestant∙es.

« Les étudiant∙es et les lycéen∙nes n’ont pas à payer la crise. La dernière rentrée du quinquennat est un condensé de politiques menées contre les étudiants et les étudiantes, les lycéennes et les lycéens depuis 2017. […] Le gouvernement abandonne et sacrifie les étudiant·es : le renforcement de la sélection, la fin du repas à 1 euro pour tou·tes ou encore l’exclusion de 73% des étudiant·e·s du système de bourses, en sont des exemples symptomatiques. Notre génération refuse l’avenir qui lui est laissé, elle en a fait la démonstration lors de très nombreuses mobilisations durant le quinquennat. Face à celles-ci, le gouvernement préfère débattre dans les médias avec l’extrême droite sur des questions identitaires et fascisantes. » – extrait de l’appel national à la mobilisation

Solidarité avec les étudiant∙es du master MEEF

Si la mobilisation et ses revendications s’inscrivent dans un contexte national, la mobilisation montpelliéraine en a profité, lors d’un arrêt devant la fac d’éducation, pour apporter son soutien aux étudiant∙es du master MEEF, actuellement en conflit avec la direction. « Les conditions d’études des étudiants en master sont anormales. On a des gros risques psychosociaux avec beaucoup d’étudiants en burn-out ou au bord du burn-out, des horaires abusés parce qu’il y a une réforme et ils nous mettent 50 heures par semaine, plus des stages et plus un concours. […] Il n’y a pas de réponse de la fac, il y a même un mépris. » Ces mobilisations font partie de la dynamique qui s’oppose à la sélection à l’université. Une sélection qui s’annonce de plus en plus accrue, avec la mise en place évoquée de ParcourSup pour accéder au master, ou encore la suppression des plus bas échelons de bourse.

C’est devant le rectorat que la manifestation était supposée se terminer. Mais c’est sans compter sur la motivation des quelques dizaines de personnes restantes. Alors que le cortège continue sa route direction la Comédie, puis la Gare, dans les artères passantes de la ville, les encouragements des passant∙es entretiennent l’élan des étudiant∙es. Rapidement, la décision est prise : iels vont apporter leur soutien aux lycéen∙es de Jules-Guesde qui tiennent toujours le blocage à la mi-journée.

Mobilisation lycéenne réussie

Ce serait presque devenu une coutume. Chaque année, les lycéen∙nes de Jules-Guesde organisent le blocage, souvent le temps d’une journée, de l’établissement. Depuis 8 heures, les trois entrées de l’établissement sont verrouillées. Assis∙es sur des poubelles ou sur le goudron, iels discutent joyeusement. Le blocage se passe bien. « On a reçu un mail du proviseur qui a annoncé la banalisation des cours toute la journée », se réjouit une des bloqueuses. Victoire symbolique, d’autant plus que, contrairement à l’accoutumée, aucune intervention des forces de l’ordre n’a eu lieu. « Le proviseur vient d’arriver, explique un autre, et l’équipe des pions a presque complètement changé. » C’est ce qui explique certainement le calme dans lequel s’est presque déroulé le blocage.

« Presque », parce qu’il ne s’est pas fait sans incident. Plus tôt dans la matinée, plusieurs lycéen∙nees ont été victimes d’agression. Selon ces dernier∙ères, « des personnes manifestement de droite ont profité de l’agitation pour agresser des lycéen∙nes venu∙es pour le blocus. » L’identification de ces personnes, ainsi que des victimes, est toujours en cours.

Comme chez les étudiant∙es, les revendications sont nombreuses. Les conséquences de la catastrophique réforme du bac se font encore sentir, en même temps que la pandémie n’arrange rien aux conditions d’études déjà difficiles. Alors entre un Macron qui détruit les services publics, une Vidal qui fait la chasse à l’islamogauchiste, quand ce n’est pas un Blanquer qui entame depuis Ibiza une croisade contre le wokisme, le gouvernement ne cache même plus son mépris de tout le secteur de l’enseignement public.

 







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