C’est un procès qui aura tenu en haleine le milieu militant écologiste montpelliérain tout au long de ce mardi. Lewis Chambard, gilet jaune et militant écologiste, était jugé pour avoir “réquisitionné” le 15 juillet 2019 le portrait du président Macron en mairie d’Assas dans l’Hérault, accompagné d’une dizaine de militant·es, dans le cadre de la campagne Décrochons Macron du mouvement ANV-COP21. Celle-ci visait à dénoncer l’inaction climatique coupable du président de la République, qui s’était pourtant proclamé héraut du climat dès sa prise de fonctions, et à remettre en question la vision du nucléaire en tant qu’énergie privilégiée pour lutter contre le dérèglement climatique.
Suite à cela, le jeune homme avait été placé en garde à vue et perquisitionné, avant de se voir poursuivi pour “vol en réunion”. Après son refus de comparaître en reconnaissance de culpabilité, le procès se tenait finalement au tribunal judiciaire de Montpellier, où dès 10h du matin, un rassemblement de soutien réunissait une centaine de personnes.
Il aura fallu attendre le milieu de l’après-midi pour voir l’audience se tenir, et la fin de journée pour que Lewis soit finalement reconnu coupable par le tribunal, mais dispensé de peine. Une sanction qui s’inscrit dans un délicat exercice politique de la justice autour de cette campagne nationale (près de 150 portraits présidentiels ont été décrochés partout en France) qui a vu quelques relaxes et des condamnations à des peines d’amendes. Retour sur un procès hors normes qui aura vu de vibrants plaidoyers donner sa juste place à l’urgence à laquelle l’être humain fait aujourd’hui face dans son ensemble.
Une action symbolique et non violente qualifiée de “vol en réunion”
La présidente a tout d’abord rappelé les faits, considérés par le parquet comme un “vol en réunion” de ce portrait présidentiel d’une valeur de 9,80€. Elle a rappelé que si d’autres personnes en étaient complices, Lewis apparaissait comme son acteur principal en ayant décroché le dit portrait et l’ayant brandi à la sortie de la mairie d’Assas. Les autres participant·es à l’action n’ont pu être identifié·es par l’enquête de gendarmerie, qui s’est ainsi focalisée sur le jeune homme, en dépit des photos publiées par ANV-COP21 Montpellier sur sa page Facebook. Le maire d’Assas, Jacques Grau, est présent en qualité de partie civile.
Pour Lewis, il s’agissait là d’une “action symbolique pour dénoncer l’absence de décision face à l’urgence climatique et sociale“. Interrogé sur son refus de s’exprimer en garde à vue, il avance la méthodologie de cette campagne, qui visait justement à déclencher des procès pour servir de tribune à la cause écologiste. Lewis reconnait les faits qui lui sont reprochés, ce que la présidente vient confirmer : “Vous agissez à visage découvert, vous assumez donc votre acte.”
Mais Lewis rappelle que pour lui, il ne s’agit pas là d’un vol, mais d’une réquisition. En effet, la campagne d’ANV-COP21 promettait de rendre tous les portraits décrochés dans le cas où les engagements pris lors de la COP21 en 2015 dans le cadre des accords de Paris seraient respectés par le président de la République et son gouvernement. Il s’agissait donc d’une opération politique et médiatique menée notamment en vue du G7 qui se tenait sur la côte basque ce même été, explique Lewis, qui élude le nombre de portraits (125) correspondant à celui des jours après lesquels l’humanité se retrouve en dette écologique vis à vis de la planète et de ses ressources naturelles.
Questionné par la présidente, Lewis énonce que cette action de désobéissance civile, “la plus symbolique et la plus douce possible” s’immisce entre les questions de la légitimité à agir et de la légalité. Ce ne sont pas les symboles de la République qui ont été attaqués mais bien l’image du président Macron, en tant que responsable politique élu.
Vient ensuite le moment du portrait psychosocial de l’accusé, très brièvement évoqué par la présidente, à laquelle Lewis explique être auteur de scénario et artiste, touché par la précarité de cette activité difficilement rémunératrice. Le jeune homme n’a aucune condamnation préalable. La présidente lui demande pourquoi avoir refusé la composition pénale en reconnaissance de culpabilité, Lewis répond une nouvelle fois que le but de l’action était d’aboutir sur un vrai procès, et d’exprimer publiquement la volonté que les engagements de la France soient tenus. “On aimerait vraiment rendre ces portraits.”
Jacques Grau, le maire d’Assas est appelé à s’exprimer. On comprend assez vite qu’il a plutôt été agacé par l’action, lors de laquelle il avait tenté de s’interposer sans succès, provoquant un léger mouvement de panique. Il ne soutient pas ce type d’actions : on peut lutter pour le climat sans commettre des actes illégaux. Et de citer en exemple sa commune, qui pratique le tri des déchets depuis une vingtaine d’années… Le maire d’Assas demande la coquette somme de 4000€ de dommages, qui ne seront jamais justifiés à l’audience.
Des témoignages scientifiques cruciaux sur l’urgence climatique
Les témoins convoqués par la défense sont alors appelés à s’exprimer. Ceux-ci sont au coeur de la stratégie de défense élaborée autour de cette action, et leurs plaidoyers vont devoir placer la question de l’urgence climatique à sa juste valeur afin de justifier la légitimité de cet acte de désobéissance civile non-violent. Vient d’abord Roland Desbordes, scientifique, spécialiste du nucléaire et fondateur de la Commission de recherche et d’information indépendantes sur la radioactivité.
Ce dernier donne alors le ton d’une manière grave : “Je suis né l’année des bombes d’Hiroshima et de Nagasaki.” Dans les années 60, il s’intéresse au nucléaire alors que la France mène des essais militaires, notamment en Algérie, et peut constater les dégâts causés sur l’environnement et les risques que font peser une telle énergie. Depuis, il ne peut que s’alarmer que la France continue d’entretenir son arsenal nucléaire au fil du temps, et continue de promouvoir l’utilisation d’une telle technologie, s’opposant même autant que possible au Traité d’interdiction des armes nucléaires (TIAN) finalement adopté en 2007. Malgré les obligations internationales mises en place, le dernier budget de la défense nationale consacre la modernisation du militaire nucléaire.
Les années 1970 voient le développement du nucléaire civil en France, alors présenté comme une énergie propre, rappelle M. Desbordes. “Le problème des déchets serait résolu dans le temps.” Après deux catastrophes nucléaires en 25 ans et d’innombrables incidents de moindre ampleur, on découvre finalement les problèmes qui étaient pourtant annoncés par la communauté scientifique : la question du traitement des déchets, du démantèlement des centrales, de leur dangerosité en cas de catastrophes naturelles… M. Desbordes regrette qu’à cet égard, les accords de Paris n’aient été qu’une “opération de communication de la France“. Les solutions apportées par le gouvernement à la question climatique reposent en grande partie sur la pérennité du nucléaire dans le mix énergétique, “des méthodes du passé” et ce alors que l’énergie nucléaire ne représente que 2% du total énergétique mondial.
D’autant que le scientifique rappelle que cette énergie n’est pas si propre que ça, repose sur un usage très intense de l’eau pour refroidir les réacteurs, et engendre diverses pollutions tierces comme lors de l’extraction de l’uranium. Pour répondre aux enjeux climatiques avec le nucléaire, il faudrait selon Roland Desbordes, multiplier par trente le nombre de réacteurs sur la planète, ce qui multiplierait d’autant les risques de catastrophes. Pour lui, les personnes qui se mobilisent autour d’actions non-violentes ont raison de s’ériger contre des méthodes passéistes, d’autant plus quand le réchauffement global change les conditions d’exercice des centrales nucléaires, dont certaines doivent d’ores et déjà interrompre leur production en saison estivale. “Alors qu’on connait les solutions depuis longtemps, on doit changer nos habitudes, moins consommer, moins gaspiller.” Mais ces solutions ne sont pas promues par nos politiques. “Macron a lui aussi choisi cette voie là”, lui qui a récemment envisagé la construction de six nouveaux réacteurs nucléaires en France.
C’est ensuite au tour de Virginie Maris, chercheuse au Centre d’Écologie Fonctionnelle et Évolutive du CNRS et spécialiste de la biodiversité. Celle-ci explique que l’action menée dans le cadre de la campagne d’ANV-COP21 regroupe des sujets situés au coeur de ses recherches. Lors de celles-ci, elle n’a pu que constater la crise et l’effondrement de la biodiversité planétaire. On s’éloigne déjà, rappelle-t-elle, de la trajectoire visant à limiter le réchauffement global à +2°C par rapport à l’ère préindustrielle, un seuil qui engendrera déjà de très nombreuses catastrophes climatiques. En parallèle, on assiste à “une crise écologique et un effondrement du vivant sans précédents dans l’histoire humaine, voire peut être de la planète. On connait mille fois plus d’extinctions d’espèces que dans le rythme naturel. 60% des vertébrés sauvages terrestres ont disparu.” Ces extinctions se font à travers la dégradation et la fragmentation des milieux naturels, à cause de l’impact humain.
“On est face à deux crises qui s’auto-alimentent” avec des écosystèmes dégradés et une augmentation des émissions de gaz carboniques qui les font basculer dans des états différents. “Ce sont les grandes tragédies annoncées depuis trente ans qui sont en train de se dérouler” citant par exemple la fonte du permafrost qui va accélérer les émissions de méthane dans l’atmosphère et dégrader les conditions d’habitabilité de la planète de manière exponentielle. Son plaidoyer est vibrant et teinté de l’émotion sincère d’une scientifique qui étudie de près la question. Les constats sont pourtant aujourd’hui unanimement validés par la communauté politique, aboutissant aux accords de Kyoto, puis de Paris, à ceux de Nagoya en 2010, tous déclinés dans le droit national. Ainsi, la loi Énergie Climat de 2019 et la loi Biodiversité en 2016 sont venues acter des objectifs très ambitieux quant à l’urgence climatique.
La chercheuse reprend les propres termes d’Emmanuel Macron, qui avait déclaré que “le combat pour la biodiversité est central et indispensable pour le combat contre le réchauffement climatique” pour le lancement de l’Office Français pour la Biodiversité, terminant même son discours par ces termes qui contredisent tellement son action concrète : “Et même si c’est le combat du siècle il impose l’impatience, il impose la détermination et il impose d’agir vite. Je sais que vous y êtes prêts, j’y suis prêt aussi. Vive la nature, vive la République et vive la France !”
Pour Virginie Maris, les mesures réelles sont loin d’être à la hauteur des enjeux. Un récent rapport des Nations Unies expliciterait qu’aucun des pays engagés dans les accords de Paris n’était, en cinq ans, parvenu à réaliser les baisses d’émissions carbonées envisagées. Le Haut Conseil au Climat, instance consultative indépendante crée sous le mandat Macron émettait ainsi dans son dernier rapport : “Il faut changer de cap“. Cependant, même la crise sanitaire de la Covid n’a pas suffi à aligner la France sur ses objectifs. Virginie Maris regrette également que de nombreuses mesures de la Convention citoyenne pour le Climat aient été retoquées par le gouvernement. Au niveau de l’agriculture par exemple, qui produit un quart des émissions à effet de serre. “C’est déconcertant de voir à quel point les politiques agricoles contreviennent aux objectifs écologiques, on peut le voir avec la nouvelle Politique Agricole Commune” au niveau européen ou “avec la réintroduction des néonicotinoïdes sur un plan local.”
La crise sanitaire, liée à la déforestation massive et à l’élevage intensif, aurait pu être “l’occasion unique” d’une remise en question efficace du modèle promu. Mais, “l’État réaffirme sans fard ses priorités, on le voit avec ce plan de relance sans contreparties écologiques, on sauve les secteurs les plus polluants et on assiste à un détricotage des processus de contrôle environnemental” notamment avec les allégements procéduraux permis aux préfets dans les cadres des projets d’aménagement du territoire. “L’état d’urgence est écologique” pour Virginie Maris, qui émet qu’on se trouve certainement dans la dernière décennie permettant d’agir pour maintenir les conditions d’habitabilité de la planète, permettant “une vie décente“.
Réquisitoire très timide du Parquet
Après ces témoignages poignants très attentivement suivis par les nombreux journalistes présents dans la salle d’audience, c’est au tour du réquisitoire de la procureure. A côté de telles démonstrations, son discours paraîtra bien pâle, s’appuyant sur la définition pénale du vol, dont les éléments matériels et moraux seraient constitués en dépit de la demande de relaxe de la défense. La procureure tente de désamorcer les possibles motifs ayant déjà abouti à des relaxes dans le cadre de la campagne des Décrocheurs, à savoir la liberté d’expression et l’état de nécessité.
Pour la représentante de l’État, l’état de nécessité suppose que l’action menée a pour but de stopper immédiatement le danger qui la motive, citant en exemple en 2007 le procès de faucheurs d’OGM ayant abouti à une condamnation. Il y aurait donc une disproportion entre le vol du portrait présidentiel et les objectifs visés. On ne l’entendra pas trop en revanche s’étendre sur la question de la liberté d’expression, qui a abouti le 27 octobre dernier à la relaxe de décrocheurs poursuivis devant le tribunal d’Auch. Elle maintient la réquisition prononcée dans le cadre de la comparaison en reconnaissance de culpabilité, à savoir une amende de 300€.
La défense enfonce le clou politique de l’action
Le plaidoyer de Me Alain Ottan pour la défense va venir y répondre d’une manière à la fois incisive et humaine, avec ce certain talent d’inclure dans sa réflexion la présidente du tribunal. Rappelant que l’on juge un acte de désobéissance civile complètement assumé, il s’attaque d’abord aux demandes de la partie civile, la mairie d’Assas, qui n’a jamais été ciblée en tant que telle par l’action qui visait uniquement la personne du président Macron. Aussi Me Ottan s’étonne de la demande d’indemnisation de 4000€, sachant que le maire Jacques Grau a reconnu lors de son audition d’enquête que le préjudice du vol du portrait se montait à une dizaine d’euros. Que peut expliquer une telle demande a posteriori ?
Le conseil s’étonne aussi de la disproportion de la réponse policière et judiciaire face à une action du mouvement ANV-COP21, non-violente et à visage découvert. Lewis a ainsi subi une trentaine d’heures de garde à vue, emmené au petit matin par les gendarmes venus perquisitionner son domicile et saisir son ordinateur, son téléphone, ses clés USB. Avant d’être poursuivi par le parquet devant le tribunal correctionnel.
Maitre Ottan tient également à repréciser certains faits. Le portrait présidentiel n’est pas la possession de la mairie d’Assas, mais appartient à l’État français. Seul le cadre peut en soi être considéré comme ayant été volé à la mairie. Pour lui, la relaxe s’impose nécessairement, d’autant que contrairement à ce qui a pu être avancé, le portrait présidentiel n’est pas un symbole de la République. Me Ottan rappelle ainsi l’article 2 de la Constitution, qui émet que les symboles de celle-ci sont le drapeau français et l’hymne national. Le conseil rappelle un peu d’histoire : la présence d’un portrait présidentiel dans les mairies de France est une coutume, issue de la volonté du président Adolphe Thiers lors de la IIIème République, celui là même qui a écrasé dans le sang la Commune de Paris, et s’inscrivant ainsi dans un acte de propagande repris par tous ses successeurs. On n’a donc pas d’atteinte à la République dans cette campagne menée par ANV-COP21, mais bien à la personne du président, qui n’est en rien un symbole républicain.
Alain Ottan considère comme inéluctable le changement climatique et ses conséquences “cataclysmiques“. Il rappelle les engagements formels pris par la France dans le cadre de l’accord de Paris en 2015, et la responsabilité engagée des états, leur obligation de fixer, publier et respecter des objectifs précis. Il dénonce la posture médiatique et uniquement médiatique du président Macron à cet égard. Ainsi, le premier rapport du Haut conseil pour le Climat a eu des mots très durs à l’égard des politiques menées, rappelant que celles-ci sont largement insuffisantes et que tant que la politique bas carbone restera en périphérie des programmes menés, on n’y arrivera jamais. Tous les rapports du Haut conseil confirment que depuis, on en est toujours au même point.
Mais ces données, si à elles seules, ne suffisaient pas à justifier l’action de décrochage, que dire de la place actuelle pour les libertés fondamentales et l’expression de la volonté populaire ? Pour Me Ottan, la période actuelle démontre que la population n’accepte plus de voter tous les cinq ans pour des représentants qui ne respectent pas leurs engagements. La question de l’action citoyenne se pose ainsi légitimement, alors que les risques à brève échéance sont immenses pour l’avenir de l’humanité. Il rappelle que deux tribunaux correctionnels ont relaxé des décrocheurs auparavant.
A Auch, où c’est la liberté d’expression qui a déterminé le jugement, s’appuyant sur l’article 10 de la Convention européenne pour les droits de l’Homme, permettant de reconnaître cette action de désobéissance civile comme une opération politique de protestation contre le chef de l’état, au coeur d’un débat d’intérêt public sérieux. Ainsi, faire délit d’une opinion non violente et largement symbolique représente une ingérence de l’État au coeur de la liberté d’expression. Me Ottan prend pour référence une action menée par les FEMEN au musée Grévin de Paris auprès de la statue de Vladimir Poutine. Les militantes poursuivies pour exhibition sexuelle ont finalement été relaxées en cassation.
Lors du procès en première instance des décrocheurs de Lyon, c’est l’état de nécessité, accordé par l’article 122-7 du Code Pénal qui a été reconnu par les juges. Dans le cas d’un danger actuel et imminent, aujourd’hui constitué par le dérèglement climatique pour Me Ottan, un acte nécessaire et proportionné devient justifié. Pour la défense, ce point peut être discutable et discuté, mais mérite l’attention de la présidente du tribunal. L’action de décrochage est-elle si disproportionnée ? Les recours juridiques contre l’État peuvent-ils suffire à eux seuls à avoir une incidence sur les choix présidentiels ? L’expérience tend à montrer que non. “Les modes d’expression de la souveraineté populaire sont complètement en panne.”
Me Ottan y va de sa touche personnelle pour rappeler les enjeux générationnels autour de la question climatique. “En cinquante ans, on a tout foutu en l’air” se désole celui qui dit craindre pour l’avenir de ses petits-enfants. “Est-ce qu’on se dit, “que nos enfants se débrouillent” ?” Alain Ottan rappelle que les enfants nés en 2020 devront dépenser trois à huit fois moins de carbone que leurs ainés pour respecter les cadres des accords de Paris. “Comment vont-ils vivre dans un monde qui va devenir une fournaise généralisée ?” Soit on attend que ça se passe, soit il y a une prise de responsabilité en tant que citoyen, d’agir pour les générations futures, pour l’avocat. “On n’a plus le choix, la responsabilité est donc celle de chacun.”
Avec subtilité, Me Ottan amène la présidente à faire elle-même ce choix, en son âme et conscience. Le rôle des juges est en effet capital car ce sont les élites qui portent le changement dans un moment où les voies d’expression populaire sont restreintes. “Nous voulons faire société, être aux côtés de nos enfants, de nos petits enfants. Vous devez prendre une décision d’espoir, et non de désespoir.” Me Ottan demande donc la relaxe totale et la restitution du matériel saisi à Lewis Chambard.
L’espoir dans le désespoir
Celui-ci prend une dernière fois la parole, se tournant vers le maire d’Assas en lui assurant que jamais il n’a été visé personnellement, ni sa municipalité, par une telle action, résolument tournée contre le personnage Macron, rappelant même que dans une lettre émise à l’adresse de la mairie, il avait été rappelé les engagements écologiques de cette dernière. Avant d’adresser avec humilité à la présidente : “Quand les gendarmes sont venus armés chez moi, me perquisitionner, je n’ai pas eu peur. Par contre, j’ai peur de tout ce que je sais de l’urgence climatique.”
Quelques heures plus tard, le délibéré tombe. Lewis est reconnu coupable du vol en réunion, mais dispensé de peine. Il est toutefois redevable à la mairie d’Assas d’un euro de préjudice moral et 38,89€ de préjudice matériel, correspondant sans doute à la valeur du cadre emporté avec le portrait. Le verdict a-t-il été une décision d’espoir ou de désespoir ? Un peu des deux. En dispensant le jeune homme de peine, la présidente reconnait la valeur symbolique, non-violente, de l’action de désobéissance civile, et semble avoir été sensible aux arguments scientifiques et politiques avancés par la défense et ses témoins. Il était en revanche à douter qu’elle donne blanc seing à ce type d’actions en ordonnant la relaxe.
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