Un automobiliste percute volontairement des colleuses féministes à Montpellier

Des faits d’une gravité très préoccupante se sont produits ce dimanche 30 août vers 23h à Montpellier. Un groupe de colleuses féministes, en pleine action sur le pont de Lapeyronie, a été percuté volontairement par un homme avec sa voiture. Deux d’entre elles ont été blessées superficiellement, une troisième plus gravement et a du être hospitalisée suite à l’agression.

Une agression d’une extrême violence

Tout commence alors qu’un groupe de quatre femmes réalisent de nuit un collage sur le pont reliant l’hôpital Lapeyronie à la Cité universitaire. En contre-bas, un automobiliste les aperçoit et s’arrête en plein milieu de la route. L’homme sort de son véhicule et tient des propos menaçants : “Je m’appelle Satan et j’ai violé la femme de Dieu. Et je vais vous violer.

Les colleuses ne le prennent pas trop au sérieux et l’enjoignent gentiment à quitter les lieux, sa voiture arrêtée en plein milieu de la route représentant un danger pour les autres automobilistes comme pour lui même. Mais l’homme continue ses invectives et ses menaces, le ton monte légèrement. “J’arrive, je vais revenir” lance-t-il.

On ne s’arrête pas de coller quand on nous menace, ce genre de commentaires, d’insultes ou de menaces peut arriver. Quand on colle, on se réapproprie l’espace public, et il y a parfois des réactions : jets d’eau, menaces, agressions, violences policières comme récemment à Nantes.

L’homme remonte dans sa voiture et quitte les lieux, les militantes reprennent le collage. C’est quinze minutes plus tard que la voiture déboule en trombe, à contre-sens, sur le pont de Lapeyronie. L’homme accélère brusquement, le véhicule monte sur le trottoir, et fonce à toute blinde sur le groupe de colleuses. L’une d’entre elles parvient à éviter la collision, les trois autres sont percutées au niveau des jambes et des hanches.

Dans la violence du choc, la voiture perd un rétroviseur et des bouts de pare-choc avant de repartir en trombe en marche arrière et de quitter les lieux. Par chance, les blessures des jeunes femmes ne reflètent pas entièrement l’extrême brutalité de l’agression. De même, alors que la réalisation du collage nécessitait qu’elles soient allongées au sol ou en équilibre sur la rambarde du pont, elles se trouvaient debout à ce moment là, sans quoi elles auraient tout simplement été écrasées ou projetées dans le vide.

Traumatisme(s) psychologique(s)

Les jeunes femmes appellent la police et sont prises en charge aux urgences de l’hôpital Lapeyronie, juste à côté. L’une d’entre elles se voit prescrire deux jours d’arrêt, qui ne prennent pas en compte la dimension psychologique du traumatisme subi, et sont délimités par ses congés. Elle a des plaies importantes aux jambes et à la hanche, et plusieurs hématomes, dont l’un forme une énorme boule qui couvre une grande partie de la cuisse, et devra être retiré par une intervention.

Plusieurs jours après les faits, elle ressent encore de fortes douleurs : “Je ne peux plus me déplacer, je ne peux rien faire, et cela a cause de blessures qui m’ont été infligées. C’est difficile à accepter.” La jeune femme ne sait pas quand elle va pouvoir reprendre le travail, elle est très touchée par ce qui s’est produit.

Certaines d’entre nous ont subi des violences très graves dans leur vie, et cet événement vient faire ressurgir des traumatismes profonds, flashbacks, crises d’angoisse, terreurs nocturnes.

On ne pensait pas qu’il allait revenir. Même s’il était agressif, il semblait dans un état assez normal, parlait clairement. Quand il a accéléré, j’ai vu son regard : c’était de la pure haine.

La violence du choc psychologique est terrible, de se voir ouvertement agressées de la sorte, et ce d’autant plus que les événements auraient pu prendre une tournure dramatique. Il s’agit bien d’un acte d’agression sexiste et anti-féministe, comparable à une tentative de tuer ou de blesser des militantes en pleine action. Les faits sont donc extrêmement graves. Des plaintes ont été déposées. Si la caméra de la station de tramway attenante n’a pu enregistrer la scène, les colleuses ont pu relever la plaque d’immatriculation de l’agresseur.

La haine, motivation de l’agression

Ces faits sont un reflet de la haine qui anime certains hommes à l’égard des militantes et activistes féministes, et qui se manifeste de multiples manières depuis les réseaux sociaux jusque dans la rue même. Les collages du collectif montpelliérain, comme ailleurs, sont très régulièrement arrachés, certains slogans des plus radicaux ont parfois une durée de vie qui ne dépasse pas quelques heures.

Alors que la vague #metoo aboutit en France à une libération progressive de la parole, la thématique des violences faites aux femmes n’a jamais été aussi présente dans l’espace public. Pour autant, le nombre de féminicides reste très préoccupant (augmentation de 21% en 2019, avec 146 femmes tuées) tout comme les agressions qu’elles soient de nature sexuelle ou violente. L’inaction gouvernementale est régulièrement pointée du doigt par les féministes, et a tourné à l’insulte avec la nomination de Gérald Darmanin à l’Intérieur et d’Éric Dupont-Moretti à la Justice.







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